Face aux bâches de Jean-Marc Scanreigh, le regardeur ne sait sur quel pied danser. Il demeure « empêtré comme la souris empeignée, ou un milan pris au lacet », ainsi que Rabelais décrit Gargantua, « bien ébahi et perplexe. » Devant Pantagruel nouveau-né, il « riait comme un veau », et le regardeur fait de même, en tapant des mains devant ces grandes peintures si vives, si joyeuses, si exubérantes, si « bavardes » parfois, qui lui en mettent plein les mirettes avec leurs multiples motifs imbriqués à ne plus savoir où donner du regard, à lui donner le tournis, et qui l’emplissent de contentement et d’énergie.
Mais quand Gargantua se tournait vers sa défunte Gargamelle, « tout soudain », « il pleurait comme une vache ». Et le regardeur, quant à lui, pourrait bien « pleurer comme une bâche .» Coulures, bavures des larmes de la pluie qui tambourine inlassablement contre les toiles bleues précaires des sans-abri. Flaques d’acrylique. Larmes salées de la mer qui rejette sur le littoral des filets fantômes, des nasses aux mailles si serrées qu’elles ligotent pêle-mêle poissons, coquillages, algues, noyés, vestiges de citadelles englouties. Et aucun rat de fabuliste pour ronger les rets et délivrer le lion. Se faire du cinéma. Se faire son cinéma. En Technicolor. Ou en noir et blanc.
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Le livre est disponible à la Librairie Durance, 44000 Nantes !